mardi 27 mars 2012

Comme un lapin

Ce matin dans Libération, on apprend qu'un type de Toulouse (Pierre, un commercial de 29 ans) a vendu en exclusivité des images de l'assaut de l'appartement de Mohamed Merah à Paris-Match. C'est sa femme qui a pris les photos (Ben quoi ? On est jamais assez prudent. Il suffit d'une balle perdue !). Elle a réalisé une centaine de clichés de l'intervention du Raid de sa fenêtre, jusqu'au dénouement final. Elle était bien placée avec son instamatic, pile dans l'axe. C'est un photographe ami du couple qui a joué les intermédiaires dans les négociations avec les acheteurs. 

"Notre ami a fait l'intermédiaire avec les médias. Toute la journée de jeudi, on a fait monter les enchères. Finalement, on a vendu les droits exclusifs à Paris-Match pour 20.000 euros", relate ce père de famille qui se dit "un peu déçu": "je pensais avoir plus" (extrait d'un article de la Dépêche ici).
Travailler toute la journée à faire monter les enchères pour obtenir seulement 20 000 euros à l'arrivée contre quelques photos, on comprend sa déception au mec. La prochaine fois, je suis même pas sûr qu'il se relève la nuit, tellement ça vaut pas le coup ! La vidéo de Mohamed Merah dans sa BM s'est négociée quant à elle, à moins de 10 000 euros. Un petit pourliche.

De leur côté, les vrais photographes ont du mal à réunir 2 000 euros pour partir en Libye au risque de se faire tuer. Ben ouais mais t'es pas au courant ?? Y a la crise de la presse ! T'es con ou quoi ??

Frozen Piglet

Cette semaine, j'ai vendu 3 photos à "El Pais" le plus grand quotidien espagnol, pour son supplément hebdo. Le tout pour la somme forfaitaire et dérisoire de 180€ (J'ai négocié 5 minutes et je suis même pas déçu. J'ai pas les moyens). 

vendredi 9 mars 2012

Vivement ce soir qu'on se couche

La semaine dernière, je suis passé directement de la Fashion Week parisienne à la Coupe du Monde de la baguette et aux éliminatoires du Bo(cu)se d'Or. Oh ça va hein ! Je fais ce que je peux, faut bien gagner sa life je te signale ! J'ai pas fais le salon de l'agriculture, c'est déjà ça ... J'ai pas marché dans la bouse.
À la Fashion Week, un type armé d'un monopode, m'a aimablement menacé  de "me renvoyer chez-moi en pièces détachées". Soit disant que j'avais traité "sa journaliste" de conne ! (Ouais, c'est possible). En me parlant, le type tremblait comme un feuille (à mon avis, il avait pas eu sa charge ou son rail du matin) et comme il était haut comme 3 pommes à genoux ... il est resté dans le déclaratif. 
À la Coupe, c'était plutôt des japonais (l'avantage, c'est qu'il sont courtois et petits) et des emmerdeurs venus de différentes contrées encore inexplorées. Je me suis un peu pris le chou avec un suédois de  1,95m (habillé en jaune. Les suédois sont tous habillés en jaune, les autres couleurs n'existent pas en Suède), genre "Keep the line !". Bien entendu, les pires restent les français qui sont les spécialistes incontestés des embrouilles à deux balles et particulièrement dans les situations où il n'y a pas lieu de faire des histoires. C'est plus fort qu'eux, il faut qu'ils la ramènent. Genre: "je travaille pour l'organisateur de cet évènement et je t'interdis de pénétrer dans cet espace inviolé ! Moi seul ai le droit d'y évoluer pour montrer mon cu ... Heu ! pour réaliser mes splendides photos avec flash direct en pleine poire. Si par hasard, tu parviens à pénétrer dans cet endroit, je me mettrais devant ton objectif en permanence pour t'empêcher de faire ton boulot, juste pour te faire chier". Tous ces gens sont bien nerveux, moi je dis. Faut dire qu'ils savent qu'ils sont en train de rentrer dans l'histoire de la photographie du 21° siècle  et qu'ils ont toutes leurs chance pour le worldPress les gars. Hein ? Quoi ? C'est juste des baltringues qui essaient de gagner leur vie dans un métier en perdition ? Ben ouais, mais ça faut pas le dire ... T'es con ou quoi ? Tu voudrais pas décourager les vocations quand même !

Frozen Piglet


Quand j'étais petit, je voulais apprendre le piano pour jouer le thème de Borsalino et voilà où j'en suis. Putain fais chier.

Dumping

Des fois, je fais du dumping photographique pour tuer les microstocks (ouais je déconne). Je ne vends pas mes photos 0,14 euro, je les donne ! Ça, tous les photographes le font, même s'ils savent très bien qu'ils auront rarement un retour quel qu'il soit ... De toute façon la valeur accordée à un fichier numérique est considérée comme à peu près nulle par une immense majorité de gens. Selon ces pauvres débiles, ça ne coûte rien et ça ne vaut rien. En fait, tout dépend un peu des circonstances. Après des parutions, j'ai souvent des demandes par mail. En général, je laisse pisser le mérinos et j'attends le deuxième (de mail, pas de mérinos) pour voir si les mecs sont vraiment motivés ou pas (j'ai pas que ça à foutre) ... Enfin les mecs non ! 9 fois sur 10, c'est des filles ! Dircoms, attachées de com, chargée de presse ou de RP ...
La dernière fois, j'ai envoyé 8 photos en haute résolution pas très folichonnes à une boite allemande de BTP (Vous savez les allemands ! ceux qui portent des chaussettes dans les sandales et que les filles se laissent pousser les poils des pattes pour se tenir chaud l'hiver).

"Vous pouvez m'envoyer une carte postale en contrepartie si vous voulez" que je lui ai fait à la fille.
"Promis ! En rentrant de vacances (vacances ? c'est quoi ???), je vous enverrai un petit kekchose" qu'elle a minaudé.

Effectivement, une semaine après, j'ai reçu par la poste 3 porte-clés fabriqués en Chine (prix unitaire 0,20 euros HT). La salope !

Frozen Piglet

vendredi 2 mars 2012

La mort au tournant

À chaque fois qu'un photographe trouve la mort dans l'exercice de son métier, c'est un traumatisme pour l'ensemble de la profession. Ce qui est dur à avaler, c'est l'instrumentalisation qui en est faite à la fois par le pouvoir politique et par la presse magazine qui aime bien rendre des vibrants hommages aux photographes morts d'un côté et d'un autre côté, les laisse partir sans garantie ni couverture dans des conditions assez merdiques et surtout extrêmement risquées. On note par ailleurs que les médias dans leur ensemble parlent de "la journaliste du Figaro" et "du photographe", comme-ci les photographes de presse n'étaient pas journalistes. Ah non c'est vrai, c'est des artistes ... ou ce genre de truc.
J'ai entendu aussi des gens s'insurger à la radio sur le "traitement de faveur" réservé aux journalistes blessés alors que des syriens meurent tous les jours. L'ennui, c'est que si l'information existe, c'est parce que des individus choisissent le métier de témoigner et de rendre compte des évènements tels qu'ils se déroulent en vrai. Ils ne sont pas les acteurs d'une guerre civile qui se déroule sous leurs yeux. Surtout, un document venu d'on ne sait où sur Youtube ne pourra jamais être comparé au travail d'un journaliste de terrain. Mais ça, les bas du front ont du mal à se l'enfoncer dans le crâne.

Frozen Piglet

Remi Ochlik, j'ai regardé son travail et c'était vraiment un très bon photographe. Il est mort à 28 ans pour avoir voulu faire son métier. 
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