mardi 30 juillet 2013

Usual suspects

Cette semaine, j'ai assisté une équipe de télé étrangère de façon bénévole (Une bonne affaire, il m'ont quand même payé une pizza régina et un coca light) pour un reportage dans les rues de Paris et quelques photos. Nous sommes passés au Palais Royal où le caméraman a tourné un plan de 10 secondes dans une allée sous les arcades. À un moment, une dame très gentille est arrivée et nous a demandé si nous avions une autorisation: 
"Laquelle ? Nous sommes une équipe de vidéo légère et nous avons donc le droit de tourner dans Paris sans autorisation de la préfecture" que je lui ai fait à la dame très gentille.
"Vous êtes dans le domaine national du Palais Royal, il vous faut une autorisation. Il vous faut aussi une autorisation du Conseil d'État, de la Comédie Française, du Ministère de la Culture et de l'Artiste Daniel Buren" qu'elle m'a dit la dame en hoquetant.
"C'est tout ?" que je lui ai fait.
"Non. Faut aussi payer 1 000 euros" qu'elle a dit la dame très gentille sans se démonter.
(Pendant ce temps une cinquantaine de personnes photographient et filment les colonnes de Buren sous tous les angles et montent même dessus en poussant des cris d'animaux). 
"Vous allez rireIl s'agit d'un sujet rédactionnel et nous n'envisageons pas de payer quoi que ce soit madame très gentille (elle a pas de nom sur son badge)" que je lui ai fait.
"Ok mais si vous diffusez ces images à la télévision, Buren va vous botter le cul et vous demander 100 000 euros. mais on peut négocier (elle téléphone) ... Aller 500 euros ... ça va ?" qu'elle me fait tout bas.
"Ne le prenez pas mal, mais on va payer que dalle Madame très gentille" que je lui ai répondu.
On avait fini les images, on a ramassé les affaires et on est parti après avoir salué la dame très gentille.

Frozen Piglet

Heureusement on peut rigoler sans demander d'autorisation au cirque Pinder

lundi 29 juillet 2013

L'espace d'un instant

À la différence des magazines des autres pays, les hebdos français dits "d'information" n'ont jamais utilisé le vrai reportage et la photo de presse à sa juste mesure (juste l'Express un tout petit peu). Cela n'a d'ailleurs jamais été dans leur culture (même pas à Paris-Match qui prétend le contraire parce qu'il publie une fois par an le boulot de Salagado). Dans l'info écrite à la française, où on sait tout sur tout, le texte est roi et on regarde le travail des photographes journalistes avec condescendance (rassurez-vous dans les autres pays aussi, les photographes journalistes ont été les premiers virés quand même). Certains osent même accuser le reportage photo de ne plus faire vendre, alors qu'ils n'ont jamais évolué dans leur façon de travailler depuis des décennies. C'est sans doute aussi pour cela que presque plus personne ne les croient et que ces magazines ont tous des tirages aussi minables. Même si leurs journalistes feignent de croire que leur point de vue compte encore un peu, j'imagine qu'ils se savent condamnés. Où alors c'est qu'ils sont vraiment cons (c'est une forte probabilité). Quoi qu'il en soit, ils finiront donc par disparaitre car ils sont incapables de se projeter sur un autre modèle que celui qui meurt à petit feu. Pour ce qui est de la photo, ces canards manqueront surtout aux agences filaires qui leur fournissent au moins 90% de leurs illustrations toutes identiques. Alors bien sûr, il y a le net qui devait permettre à la presse de prendre un nouvel essor ou même de renaitre, tel le Phénix de ses cendres. On constate que le manque de pognon lui permet tout juste de produire du contenu débilitant mais gratuit pour des illettrés, qui ne sont de toute façon pas des lecteurs de la presse payante. L'essentiel est donc de bourrer le crâne à ces jeunes républicains, avec des fables sur les nouvelles technologies, pour les transformer en bons petits soldats consommateurs de smart-phone et de fringues H&M. Des observateurs bien informés prétendent déceler l'émergence d'une nouvelle culture dans ces bouleversements ? Il s'agit en fait du naufrage d'un modèle à la dérive dépassé par les évènements, où surnagent juste quelques opportunistes parfois un peu chanceux.

Considérons un instant cet article de Marianne.fr qui est à mon sens représentatif du contenu simpliste qui est supposé toucher  le coeur des "hipsters" et le fond par la même occasion: "Instagram: après les photos, les vidéos". Quelques extraits choisis !

"Cette application permet à n'importe qui de devenir photographe l'espace d'un instant" (C'est comme les instant soupes avec les nouilles ... un peu d'eau chaude et hop !)
" Les gens y partagent tout ce qui possible et imaginable, de la nourriture jusqu'aux photos de vacances" (Ouais ouais. On bouffe aussi gratos sur Instagram, tu savais pas ?!)
"André Gunthert, chercheur spécialiste des cultures visuelles et numérique analyse ce phénomène comme un moyen d'exister en dehors de son quotidien" (Encore ! Oh putain ... L'opinion d'un chercheur est par essence imparable. Il va adorer)

On sent le mec qui a travaillé son sujet. D'ailleurs le truc est aussi de truffer son texte de liens pertinents pour venir à l'appui de sa thèse comme dans l'article de Marianne.fr avec "6 conseils pour avoir plus de followers sur Instagram". Sur cette page Wikimedias, voilà ce qu'on y trouve:

"alors nous avons décidé de vous poulez d'instagram et comment avoir plus de followers"
"Lors de l'affichage des photos, ne publiez que les meilleurs d'entre eux. Si vous publiez toutes vos photos dans une rafale, certains de vos abonnés peuvent les manquer, et ceux qui n'en ont pas pourraient se fâcher car vous inonder leur flux"
"Vous remarquerez quelques tendances: il y a toujours un peu horizons, un adorable animal ou deux, quelques coups de HDR et au moins une femme séduisante"

En fait j'ai compris. Les rédacteurs de ces trucs-là sont en Chine et c'est les même mecs que ceux qui traduisent les mode d'emploi pour les ventilateurs et les cuiseurs de riz avec un traducteur automatique. Ben ouais et ça revient plus moins cher ! Bon en même temps personne ne lit ça tu vas me dire ... Ben si moi ! Et après, c'est repris sur le site de Marianne. C'est ça Internet.


Frozen Piglet








mardi 23 juillet 2013

Sans péridurale

Même si la retouche ne date pas d'hier, le digital a banalisé les manipulations d'images en proposant des outils à la portée de tous les affreux. Dans le milieu de l'art, certains prétendent depuis longtemps "dé-créer" des oeuvres d'artistes reconnus en les travaillant parfois à la lampe à souder (pour les faire avouer sans doute comme la Gestapo). D'autres névropathes préfèrent les prendre pour cible en tentant de les détruire. L'essentiel étant de se situer sur le même plan que l'artiste original en s'appropriant ainsi une parcelle de son éternité.

Dans la photographie, on remarque deux attitudes voisines qui s'apparentent à ce genre de comportement, même symboliquement. La plus courante est de constater qu'un pauvre baltringue qui photographie une "oeuvre" en plan serré dans l'espace public considère qu'en lui offrant de naitre une seconde fois sous une forme digitale, il devient d'une certaine manière l'accoucheur sans péridurale de son double. Il lui arrive donc de se considérer ainsi titulaire de droits imaginaires sur une oeuvre dont il n'est pas l'auteur. On peut citer le cas des maniaques des photographie de street art, de peintures murales, des collages et autres grafittis (avec pour vrais auteurs: Ernest Pignon Ernest, Miss Tic, Bleck le rat, Jerôme Mesnager et plein d'autres ...). La plupart du temps, ces mecs ne font même pas l'effort de situer les oeuvre dans leur environnement sous un prétexte documentaire. Sous couvert d'une pseudo culture urbaine, ils ne pratiquent qu'une accumulation de plans serrés pour se constituer une collection de photos à bon compte et masquer leur nullité en terme de création. Certains de ces presse-boutons de bas étage ont même l'audace de tenter de négocier ce genre d'images par l'intermédiaire des microstocks, ce qui révèle le désert qui les habite. Ce sont d'ailleurs souvent les mêmes qui prennent en photo à leur insu, les clodos dans leur pisse. L'aboutissement de ce comportement de décérébré est de traiter un être humain comme un objet à partir du moment où il est pris en photo. 


Si on se penche encore plus sur la photographie il existe une attitude plus sournoise qui consiste à s'attaquer à des images icônes du photo-journalisme (sans doute parce que elles sont connues de tous), en retranchant ou en ajoutant quelque chose. Là encore, le manipulateur (faut-il le désigner comme un faussaire ou un plagiaire ?) considère qu'il devient en quelque sorte l'auteur délégué d'une oeuvre nouvelle, détachée de l'oeuvre initiale. On est là face à un public un peu plus averti et à des individus qui revendiquent leur statut d'artistes ou de plasticiens et des références culturelles. Si le résultat est le même et ne suscite à mon sens que du mépris, seule cette dernière catégorie peut se retrouver citée dans la rubrique arts et culture d'une site d'information (de seconde zone). Comme ici sur le "Huffpost", pour Pavel Maria Smejkal avec ses images vides. Juste pour rigoler, j'en publie 2 que vous allez identifier les doigts dans le nez, j'en suis sûr. Notez la forme du copyright dans l'image, on y parle "d'illustration" et non pas de photo. Outre cette série cet "artiste" propose d'autres images avec des substitutions de visages sur des photos prises dans des camps pendant la seconde guerre mondiale.
Vivement les vacances et la plage parce que j'en ai vraiment plein le cul !

Frozen Piglet


mercredi 17 juillet 2013

Don't be afraid

Pour les photographes, Internet a eu au moins le mérite d'ouvrir de nouvelles possibilités de collaborations avec des magazines basés parfois à l'autre bout du monde. Une perspective qui nécessite de maitriser l'anglais un minimum et qui n'a jamais compensé toutefois l'effondrement du secteur de la photo professionnelle, en ce qui concerne la presse et aussi les autres secteurs (corporate, illustration, agences). Cela selon mon expérience personnelle bien entendu. Après il faut se faire payer, surtout à l'autre bout du monde. Au jeu des embrouilles, les chinois sont des spécialistes et les américains ne sont pas très loin derrière avec des tarifs qui frisent le ridicule. Finalement, il vaut mieux se tourner encore vers la vieille Europe, même si l'Espagne est en faillite et que les italiens ont tendance à être amnésiques. Les allemands restent une valeur sûre et conservent un semblant de considération pour les gens comme-moi. Le principal étant qu'ils payent souvent rubis sur l'ongle. 
Il y a encore 2-3 ans, je travaillais assez régulièrement avec 2 hebdos fridolins qui me payaient de 100 à 150 euros selon le format de la photo et la parution. Un jour, tout s'est arrêté sans que je comprenne quelle en était la raison. En croisant une collègue allemande il y a peu de temps, j'ai compris quand elle m'a révélé que les tarifs pour ce type de parution frisaient aujourd'hui les 20 euros. J'ai enfin compris la gêne qui s'emparaient de mes interlocuteurs. Plutôt que de répondre à mes interrogations, ils préféraient couper court et m'oublier en même temps que le peu de conscience professionnelle qui leur restait. Pour le reste, les jeunes photographes prêts à vendre leurs photos 20 euros à des magazines à gros tirages courent aujourd'hui les rues (il y en a même qui filent leurs photos contre rien). Mais ils ne se rendent pas compte du mal qu'ils font au métier qui les fait rêver. Ils auront un réveil pénible car jamais ils n'arriveront à vivre de ce boulot dans ces conditions et les dégâts sont justes irréparables. Même les magazines russes qui payaient 2 fois moins que les allemands ont arrêté de faire appel aux gens comme-moi. Quel métier peut subir un tel essorage et résister à des baisses de tarifs de 50% chaque année ? Sur quelle réalité économique repose cette tendance lourde à massacrer une profession ? Ce sont les questions que je me pose.

On a beaucoup parlé récemment de la suppression par le Chicago Sun-Times de la totalité de son service photo (30 personnes salariées, dont des mégas pointures du photo-journalisme). Je viens de trouver les nouveaux tarifs des éditions de banlieue de ce journal pour les quelques free-lance qui continueront à travailler avec ce groupe de presse comme collaborateurs extérieurs. Alors que le tout venant sera assuré par les I-Phone des rédacteurs multimédias d'opérette. 

Prise de vues News/feature: $65
Prise de vues News/feature photos et video: $85
Prise de vues sport: $90
Prise de vues sport photos et video: $110
Pour chaque reportage, le photographe doit soumettre 5 à 7 images au minimum et 10 au moins pour le sport. Le responsable du "nouveau service photo" indique que les reportages effectués pour le journal principal du groupe (le Sun Times) devraient être mieux payés (ça va pas être difficile). Le tarif standard s'établit donc à $10 la photo environ. Un ancien photographe indique dans les commentaires qu'il était payé $75 la photo par le même journal il y a 40 ans ... (lire les détails et les commentaires ici). Est-ce véritablement un progrès de proposer à quelqu'un un travail qualifié pour le quel il sera payé 7,5 fois moins qu'il y a 40 ans ? Je vous laisse le soin de répondre à cette question, mais les éditeurs de ce journal semblent le penser (ils sont peut-être payés eux-mêmes 7,5 fois moins qu'il y a 40 ans ?). 

Personnellement j'imagine que je préfèrerais foutre le feu à mon matériel plutôt que de travailler dans ces conditions. Pourquoi je dis tout ça ? Je ne sais pas, mais des fois je suis fatigué.

Frozen Piglet

Stage à tous les étages

Quand plusieurs commentaires ont relaté sur le post précédent la ratage minable survenu dans une publication chargée de faire la promotion du Festival de Montreux (un festival de Jazz très connu), j'ai d'abord pensé que c'était une plaisanterie de bas étage digne d'un fake (ils sont tellement nombreux). La suite semble indiquer que non (Toute l'affaire en résumé sur le site de Libé Ici). Il faut dire que dans le milieu du Jazz, on voue un véritable culte au vol des images et au pas vu pas pris, en particulier dans les festivals. Je le sais pour avoir fréquenté un temps ce milieu fait de déconvenues (du moins sur ce plan là). On avait déjà eu au sujet de cette affaire, le cocktail "Petit Gregory" avec son olive qui remonte à la surface, dont la recette figure désormais sur tous les sites spécialisés (comme ICI). De l'humour belge bien senti dans le film: "C'est arrivé près de chez vous". Mais on le voit avec cette affaire, l'humour suisse est d'un autre niveau. Le coup de "l'erreur du stagiaire" avec toutes ses variantes est devenu de nos jours un vrai sujet de rigolade chez tous les professionnels de l'image, de la presse et de la communication. Ce prétexte pitoyable et lâche invoqué en toute circonstance par les donneurs d'ordres reste le dernier argument pour tenter de s'affranchir de toute forme de responsabilité. On transfère ainsi la totalité de sa faute sur un individu qui par essence même (il est stagiaire) ne peut pas avoir le pouvoir de prendre des initiatives et endosser une quelconque responsabilité. Et même s'il en prend, elles doivent être soumises à un contrôle puisqu'il s'agit d'une formation. Autre coupable désigné de façon récurrente: Google images comme toujours. Ce moteur de recherche qui permet de cibler de façon sélective sa recherche, selon des critères de taille de fichier (et par conséquent d'utilisation). Si j'édite un document en volant des images et que je suis pris la main dans le sac, c'est la faute d'un stagiaire et de Google images. Un peu court comme explication.

« Il s’agit d’une photo qui a été téléchargée par une personne très jeune, qui ne connaissait pas l’affaire. Les exemplaires du Montreux Jazz Chronicle de samedi étaient déjà partis à l’impression avant que l’erreur ne soit constatée mais la version numérique a évidemment été immédiatement retirée et modifiée. On espère que cela n’a pas offusqué trop de gens » a déclaré le directeur général du festival au journal Le Bien Public.
On mesure les arguments imparables:
On trouve tout et n'importe quoi sur le net. Comment faire le tri ?
C'est une personne jeune (donc non responsable pénalement) qui a fait cette erreur.
Cette personne est trop jeune pour connaître cette affaire qui date de 1984.

On ne trouve pourtant aucune image de Gregory Villemin dans les résultats, quand on fait une recherche avec le mot "enfant" sur Google Image (j'ai vérifié). C'est le directeur de la publication qui est responsable pénalement dans ce cas précis. On parle de cette affaire depuis 30 ans et notamment dans le cadre de nouvelles recherches sur l'ADN très récentes.

Mais c'est bien les stages. C'est formateur et puis il faut bien trouver une occupation aux 27% de chômeurs chez les moins de 25 ans et aux élèves de troisième année. Vivement que les stagiaires débarquent dans le nucléaire les mecs. 

Frozen Piglet

Ça me fait penser que j'ai croisé il y a peu, lors d'un reportage une jeune femme titulaire d'un Master 2 et spécialisée en droits des affaires. Elle m'a indiqué qu'à 29 ans, on ne lui proposait que des stages et elle a donc décidé d'abandonner le métier de juriste.

lundi 15 juillet 2013

Le service des objets trouvés

Les gens qui prétendent que les professionnels s'inquiètent de la concurrence des amateurs me feraient éclater de rire si j'avais pas de l'Herpès. C'est tellement drôle de supposer que quelqu'un qui utilise dans la pratique professionnelle de son métier un outil technologique, pourrait se sentir mis en péril par des gens qui jouent avec. Bien entendu, le mythe total du partage non marchand est sans cesse invoqué pour venir à l'appui de ces thèses qui plaisent aux idiots. Cet écran de fumée ne peut pas masquer une situation inédite où l'immense majorité des photos mises en ligne sur le net n'appartiennent pas à ceux qui les postent. Il faut donc absolument relire cela selon une perspective parfaitement positive et accessoirement libérale pour justifier toute cette merde.
On peut se demander d'ailleurs naïvement, quelle folie peut pousser des dingues à dépenser des milliards de dollars pour acquérir des "réseaux sociaux" principalement construit sur la base du vol du travail d'autrui et donc sur du sable. Ce pari sur l'avenir est bien entendu sans ambiguïté. Il s'agit de ne plus jamais payer aucun contenu (mais si on peut en plus le revendre, c'est cool). N'en doutez pas, les amateurs ne seront dans cette histoire qu'un prétexte minable pour cacher une fois de plus la turpitude des utilisateurs de contenus et les professionnels, les victimes collatérales de cette pourriture putride. Car rien ni personne ne sera épargné.
On peut citer pour mémoire le scandale des oeuvres dites "orphelines". Une disposition par laquelle il s'agissait de tuer l'auteur symboliquement et légalement pour s'approprier ses droits. Ou encore la condamnation de l'AFP éhontée qui prétendait distribuer et vendre à son profit des photos, au seul motif qu'elles avaient été postées sur internet par un journaliste (qui cherchait de l'aide après une catastrophe humanitaire) (*). Mais dénoncer cela, pour certains en déficit de compréhension du système, c'est être dans la théorie du complot et se voir ravaler au rang des petits QI. Être de ceux qui ne veulent pas comprendre que l'humanité a tout à gagner à se soumettre à ce genre de diktats. Tant pis si les morts ne sont plus là pour en profiter.
Ce qui compte pour ces gars-là, avant tout le reste, c'est que l'info et la culture circule librement. T'es con ou tu le fais exprès de pas comprendre ? Par exemple le fait qu'une flopée de médias (dont certains de tout premier plan) prétendent faire témoigner des individus sur un évènement auquel il n'ont pas assisté (ICI sur deldebbio.net avec l'accident de Bretigny), c'est une belle avancée et on va pas arrêter le train de l'information (joke) pour si peu. Si des minus ont publié sur leur fil twitter des photos en laissant supposer qu'ils en seraient les auteurs alors que c'est  parfaitement faux, c'est qu'ils maîtrisent beaucoup mieux les réseaux sociaux que l'orthographe et les horaires de trains. Ils sont donc parfaitement en prise avec la réalité du moment. Dans ces conditions, ces pauvres crétins deviennent l'objet de toutes les attentions de ceux qui flairant la bonne affaire, convoitent du contenu gratuit pour l'utiliser et encore mieux le revendre dans le monde entier. Vous voulez utiliser mes photos ? Allez-y servez-vous les gars ! L'auteur, le vrai ? Il n'existe pas mon ami. Un simple "yes" suffit. Et puis on est pas vraiment auteur sur un réseau social enfin voyons !  D'ailleurs le crédit changera autant de fois que la photo (vidéo) sera postée sur des fils où il deviendra enfin "ma photo", "ta photo" ou "sa photo" et "notre photo", "la photo". Pour finir par ... Bah ....  je l'ai trouvé sur Internet ... Alors on prend tout ce qu'il y a à prendre sans se poser de question comme les collègues. C'est pas bon pour l'audience. Et puis tout ça finalement, on s'en fout totalement non ? L'essentiel est que l'info circule vite.
Surtout quand il y a des morts. Dans un monde où l'on meurt vite, il faut vivre vite comme James Dean. Kesta ?

Frozen Piglet


(*) Il y a aussi TumblR, un édifice construit sur rien ou Instagram qui change les conditions d'un contrat en cours de route. Sans oublier FlickR qu'on nous présentait sans rire comme une plateforme d'échanges de photos entre amis !











samedi 13 juillet 2013

Facebook se fout de ma gueule

Depuis que Facebook colle des posts publicitaires partout, il ne se passe pas une semaine sans que je vois cette annonce sur ma page FB. Je ne savais pas qu'on pouvait apprendre le métier de photo-reporter sans bouger son cul de sa chaise. Mais on en apprend tous les jours et aujourd'hui, on constate que ce ne sont plus les conneries qu'on peut proférer qui comptent, mais l'assurance avec laquelle on les débite consciencieusement. 

FP

vendredi 12 juillet 2013

Lili Marlène

Comment ne pas être photographe quand on l'est, c'est la question qui se pose quand on part en voyage de presse. Faire 2-3 photos acceptables avec autour de toi une quinzaine d'individus brandissant tout ce qui se fabrique en matière de numérique, ce n'est même plus un challenge, c'est un chemin de croix. Cette semaine, j'ai pris le train pour l'Allemagne avec dans mon MP3, Lili Marlène (par Dietrich) et la compil de Patricia Kass. Eh ben je vais vous dire, l'Allemagne c'est le bordel et pourtant, j'aime les bretzels. Contrairement à ce qu'on nous raconte partout en France, la seule chose qu'ils ont gardé de la fameuse "rigueur germanique" les fridolins, c'est le timing. T'as même pas le temps de respirer ! Alors pisser, t'imagines ? Bientôt on sera équipés de couches-culottes pour être sûrs d'être à l'heure et de respecter le planning. Et si tu t'avises de prendre 2 minutes pour changer l'eau des poissons rouges malgré tout, quand tu reviens sur le parking, le bus est déjà parti avec ton matos, en te larguant en rase campagne. Alors sinon, avec l'expérience de mes quelques heures de vol, j'ai fini par dégager une typologie des individus qu'on peut croiser en ce genre de circonstances. 

Journaliste de type 1 : Équipé d'un compact avec un flash intégré qui explose le premier plan situé à 20 cm en sous-exposant de 5 diaphs le sujet principal. Utilise toujours un appareil acheté en 1999 dans un aéroport parce que "il marche toujours et qu'il en changera seulement quand il tombera en panne".

Journaliste de type 2 : Elle a un Olympus ou un Sony (car c'est une fille), ce qui l'autorise à se placer systématiquement devant toi au moment où tu déclenches. Si tu lui fait amicalement remarquer, elle ne comprend visiblement pas de quoi tu parles. Une tête à claque.

Journaliste de type 3 : Il shoote en Raw avec son 5D MKIII sur les conseils de son ami photographe de Mode chez Olida qui s'y connait. Ça tombe bien, on est dans une usine de robinets.

Journaliste de type 4 : Utilise son téléphone à bout de bras. Elle met en moyenne 10 minutes avant de déclencher (elle soigne le cadrage). Variante: fait son reportage à 2 mains avec un I-Pad en écartant bien les coudes.

Journaliste de type 5 : Il n'a pas d'appareil photo. À quoi ça sert ? Le service de presse va lui filer des tofs sur une clé USB. Il se tient malgré tout en toutes circonstances au coeur de l'action, par conscience professionnelle. En réalité, il n'en a rien à foutre de faire chier tout le monde. Un gros con (il a du bide , il pue la sueur et il porte une chemise à carreaux en général).

Journaliste de type 6 : Pas inspiré par le sujet, il tente de refaire la même photo que toi dés que tu as le dos tourné. En général, il jette son dévolu sur celui qui a le plus gros appareil et il ne le lâche plus pendant 2 jours. Inoffensif. 

Journaliste de type 7 : Adore photographier les objets exposés dans des vitrines en verre avec un flash, puis contempler le reflet du flash sur le verre de la vitrine avec un air surpris. Fascinant.

Journaliste de type 8 : N'en a rien à foutre de rien et passe son temps à photographier des trucs qui n'ont strictement rien à voir avec le sujet. Je vais m'installer à la même table que lui à midi.

Journaliste de type 9 : Vient de se rendre compte qu'il a oublié sa batterie et ses compact flashs sur son bureau en partant. L'ennui, c'est que c'est la deuxième fois cette semaine. Paniqué en toute circonstance.

Journaliste de type 10 : Te demande au cas où il aurait foiré ses photos, si tu peux lui filer les tiennes en HD par mail. Variante: te demande si tu peux faire une photo de lui et lui envoyer en te collant sa carte de visite crasseuse dans la main. (je dis oui et je l'envoie jamais).

Hors catégorie : L'attachée de presse (ou la chargée de com) a vu tes photos dans le journal et considérant les merdes qu'elle a commises avec son appareil personnel, elle te passe un coup de fil pour savoir comment "elle peut les récupérer" les tiennes pour les balancer à l'ensemble de ses contacts presse. Fume c'est du belge.

Voilà. C'est ça la photographie dans la presse. Kes ta ta ?

Frozen Piglet












lundi 8 juillet 2013

Un mois exactement



Il y a un mois exactement, le 6 juin, Didier François, grand reporter à Europe 1 (et longtemps à Libération) était enlevé en Syrie avec un photographe Edouard Elias, également parti pour Europe 1. Après un mois sans nouvelle des deux, un comité de soutien va se mettre en place. Il sera coordonné notamment par Serge July. Un premier rassemblement de solidarité se tiendra devant Europe 1, rue François 1er, mardi 9 juillet à 15H

(source LeJdL)

samedi 6 juillet 2013

Allo quoi allo !


Depuis que le photojournalisme doit se pratiquer avec un I-Phone (5 sinon c'est comme-si tu dit que t'es un fille et t'as pas de cheveux), on ne sait plus très bien à quel saint se vouer. J'ai appris à ce propos que c'est Saint Véronique (vera icona) qui est notre patronne. Faudra que je pense à aller bruler un cierge un de ces jours et lui demander une augmentation. J'ai bien essayé Sainte Rita, mais ça marche pas des masses, surtout ces derniers temps. Alors forcément, avec le pognon qu’on va tous économiser, on va pouvoir s'acheter des rollex et des belles bagnoles (personnellement ce sera une Chevrolet corvette Stingray). Enfin je veux dire si on s'y met tous à l'I-Phone. 



En voguant sur la vague de bêtise qui nous accable, tout un tas de sites (*) proposent déjà des splendides "extensions photo" pour I-Phone, des compléments grand-angles et des téléobjectifs à l'attention d'une nouvelle race de journalistes et même des éclairages de poche avec plein de leds. J'ai hâte de voir les nouveaux journalistes de compétition se les enfoncer jusqu'à la garde dans l'oreille par inadvertance en répondant à un coup de fil urgent de leur rédaction. Ces trucs sont d'ailleurs des sous-merdes optiques très très en dessous de la lunette de Galilée, mais elles sont bien meilleures pour produire des franges chromatiques du plus bel effet et étouffer le pognon des billes avec du Made in China en plastoc.

La palme toutes catégories de la connerie revient au concepteur de l'adaptateur pour monter un 80-200 ou un 24-70 Nikon ou Canon (voir photo) sur l'I-Phone. Ça c'est clair c'est pour nous. Ben ouais ! On a déjà les lens et comme ça on pourra toujours se reconnaitre entre professionnels et se faire un clin d'oeil (vu qu'on n'aura plus à regarder dans un viseur). Moi j'aurais préféré monter une optique de 20x25 de marque Henri Gaud sur mon téléphone, mais ça va pas être possible. Pourtant ça aurait de la gueule. Sinon j'avais pensé clouer mon I-Phone au fond d'une chambre 20X25 comme dos numérique. Pas mal non plus ... C'est jouable. J'Chuis sûr ! Et comme ça je pourrais bosser pour le National Geographic.

Frozen Piglet

(*) Ces sites de gadgets sont ceux qui ont vendu pendant 10 ans le plastique au prix de l'or avec les Lomo, Diana, Baby Lens et autres Holga.

mardi 2 juillet 2013

Sage comme une image




Il y a plus d'un mois de cela, je postais un sujet sur le licenciement brutal de presque tout le service photo du Chicago Sun-Times (soit 30 personnes dont des pointures de première) pour être remplacé par des superbes I-Phones flambant neufs tenus à bout de bras par des rédacteurs enfiévrés et tri-médias (texte photo et vidéo). C'était ici "Du passé, faisons table rase". On pourrait facilement tomber dans le fait divers et s'en foutre si cette "pensée unique" ne se répandait pas comme une maladie incurable, dans les esprits perturbés pour lesquels, quand ça vient des States, c'est vraiment trop frais kwa ! Il faut donc mesurer que cela nous pend au nez comme un sifflet de 2 ronds et que tôt ou tard, on nous fera le même coup ici. Ça tombe bien les mecs, j'ai un I-Phone 5 and I am ready to press the button wouuuuu ! Je peux même importer des photos prises avec mon D4 dans mon I-Phone 5 (ce qui est du plus bel effet) et faire croire que je les ai prises avec mon téléphone à des Pictures Editors abrutis. Wouuu wouuuuu !
Aujourd'hui c'est la fête à la photo dans "Libération" qui vient de se réveiller, un mois après. Une correspondante charmante qui assure (je cite) "l'intérim à New-York" pour Libé (elle a sans doute été recrutée par Kelly Services ou ManPower) vient nous rappeler cette affaire et tout le bénéfice qu'on peut néanmoins tirer de cette nouvelle organisation du travail qui plairait au MEDEF (c'est normal, elle est passée par l'EHESS, une école de pensée. Je dis ça, je dis rien). Alors l'article en question est illustré par des photos du type (Ben Lowy) qui nous avait fait le coup d'Instagram avec la couv de Time Magazine sur l'Ouragan. Un super pro qui a choisi son camp et qui fait du reportage de guerre à l'I-Phone en étant distribué par Getty (une petite boite). Ben oui ! Les rédacteurs qui vont faire les photos avec leur I-Phone, il faut les former d'abord ... T'es débile ou quoi ! Et là on a pas encore eu le temps. Tout ça, ça s'apprend pas en 5 minutes (tiens moi je croyais que si en fait mais je suis un peu con alors ?). Dans ce papier Ben Lowy fait un peu beaucoup la promo du truc "L'I-Phone est aujourd'hui l'appareil photo le plus populaire, personne ne peut le nier" qu'il dit. Je ne nie rien du tout mais quand même ... Apple lui a peut-être filé un T-Shirt si ça se trouve ?
Tout cela tombe à pic comme pub Heuuuuu comme info !!! info info !!!!, parce des I-Phones, il s'en est vendu 125 millions en 2012 et "Via des applications comme Hipsmatic ou Instagram, les photos peuvent être non seulement retravaillées sans passer par un ordinateur, mais aussi publiées sur Internet à la vitesse grand V " elle dit la correspondante de Libé. Bon alors résumons-nous. Les professionnels n'ont pas le droit d'utiliser Photoshop pour travestir la réalité. Ils se font assassiner comme le gagnant du WorldPress 2013 pour 2-3 curseurs déplacés. Mais là tout est permis et si en plus on vend des I-Phones, c'est Noël et champagne pour tout le monde. C'est vraiment cool j'en ai déjà un. Je me demande si je ne vais pas ouvrir un compte Instagram les mecs en assouvissant mon besoin de liberté que j'ai. Mais ce qui est encore plus super, c'est qu' "un téléphone peut paraitre moins menaçant qu'un appareil photo et permettre une plus grande intimité ". Ben ouais quand on te brandit un téléphone à 10 cm sous le pif tu ne dois pas te sentir agressé (répète le 50 fois pauvre con). Ou alors c'est que t'as raté le rendez-vous avec l'an 2000 et on peut plus rien pour toi. Sinon, un Nikon et un flingue c'est kif kif, c'est noir et tout et tout ...  donc c'est un peu normal si tu te prends une balle. T'as compris ?

Frozen Piglet

Il y a pas longtemps, j'ai lu que Libération pourrait bien passer sous la barre des 100 000 ex assez rapidement si ça continue et même disparaitre à force de bouffer du fric. Ils vont peut-être supprimer le service photo pour faire des économies eux-aussi. T'es marrant toi. Ça coûte cher un photo et un photographe alors je te dis pas ! (Hein y'en a plus ? Ouais ta gueule vas acheter ton I-Phone)

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